28/02/2014
Grasse mat. Le train pour Shanghai est à 16h30 et j’ai la journée pour traîner dans Huaihua ! Or il n’y a rien à voir dans cette grosse agglomération ! Et en plus il pleuviote …
Donc après avoir remis ma valise à la consigne, je tente tout de même de trouver un train partant plus tôt, mais tout est complet !
Alors, j’erre dans cette ville qui ressemble à toutes les autres : chantiers de voirie, tours inachevées, bousculades sur les trottoirs pourtant glissants,… Méli-mélo d’immeubles au bord du péril, de constructions neuves, de bâtiments style clapiers, etc. Pas spécialement d’effort pour créer un paysage urbain. L’air sinistre des rues est accentué par ces grilles qui barrent chaque fenêtre jusqu’aux derniers étages, ces stores déglingués et déchirés qui pendouillent, les traînées noires qui dégoulinent des toits et dues à l’humidité quasi permanente.
Ici, pas de parc où se poser, ni de bistro pour s’asseoir cinq minutes. S’il pleut un peu trop, je me réfugie dans ces immenses « shopping mall », qui sont censés distribuer des produits de luxe, mais dont les toilettes sont aussi bouchées que celles des gares.
Mais le plus énervant, c’est le bruit continuel qui agresse à chaque seconde : les violents coups de Klaxon aux notes suraiguës des voitures, des camions, des bus… La moindre mobylette dispose d’un dispositif égal à celui d’un paquebot… Et quand on regarde bien pourquoi ces gens les utilisent, on ne voit pas d’autre raison que celle de dire « attention ! c’est moi, j’arrive ! ».
Et le vacarme vient aussi des trottoirs : les magasins (majorité de fringues et de chaussures) se succèdent sur des kilomètres, chacun disposant d’un haut-parleur braillant de la musique, des réclames, ou les harangues de la vendeuse. Les vendeurs ambulants disposent d’un micro-haut-parleur attaché à la ceinture pour vanter leurs produits. D’autres ont carrément le mégaphone scotché sur leur roulotte et branché en direct sur une bande enregistrée. À cette ambiance, il faut ajouter, les marteaux piqueurs et les pelleteuses des chantiers, les annonces des réclames des grands panneaux lumineux des carrefours, et au loin, les trompes des trains qui évoluent sur les nombreuses voies qui entourent la ville.
Et il ne faut pas oublier les gens eux-mêmes ! Ici, on est habitué à parler haut et fort quelles que soient les circonstances. Parfois, on croit que les gens s’engueulent : mais pas du tout, ils se parlent normalement …
Je fais quelques courses en prévision des plus de vingt heures à passer dans le train, car les plats qui y sont préparés sont difficilement digestes (épicés et hyper-gras)…
J’ai donc de l’avance pour prendre mon train. J’ai la bonne surprise de constater que la vaste salle d’attente est bien calme malgré le monde, mais la mauvaise de voir les nombreux fumeurs s’entasser à proximité des poubelles où il y a de gros logos « interdit de fumer », sous le regard indifférent des policiers et autre personnel des trains.
Le trajet doit durer 20h pour faire 1450 km. Le train a un peu de retard. Les wagons « places assises » sont plein à ras bord. Heureusement, les wagons « couchettes » sont à l’abri du surnombre. Dans le « compartiment » d’à côté, un jeune couple avec un bébé se fera virer par trois contrôleurs : ils n’avaient rien à faire sur des couchettes prévues pour d’autres…

J’ai une réservation pour une couchette en haut sous le plafond. Chaque « compartiment » contient les deux lits du bas, à 30 cm du sol, les deux lits du milieu, 90 cm au-dessus, et les lits du haut, 60 cm au-dessus, ce qu’il fait qu’il reste moins de 50 cm jusqu’au plafond, alors là-haut, ce n’est pas facile pour manœuvrer. Les lits font 60 cm de large. Rien pour accrocher les fringues et pas de loupiote. C’est un peu juste !
La plupart des gens sont déjà couchés, et somnolent ou jouent à des jeux sur leur mobile.
Le wagon n’est pas un endroit calme non plus ! Les gens, les contrôleurs, les agents de l’entretien défilent continuellement dans le corridor, les roulottes de bouffe circulent sans arrêt, clamant devant chaque « compartiment » leur spécialité. Les gens sont dans le train comme à la maison : les enfants courent partout et crient à volonté, les gens s’interpellent fort même s’ils se font face, les jeux vidéo guerriers égrainent leurs infernales ritournelles suraiguës, les appels téléphoniques sont comme autant d’appels au secours, et bien sûr, il y a la musique d’ambiance du train (qui n’est pas la pire…).
Rares sont les gens qui vont au bout du wagon évacuer leurs nombreux déchets ; mais, au fait, pourquoi faire puisque la poubelle est archipleine et déborde dans les éviers destinés au lavage des mains. Vers 21h30, un agent vient tout de même ramasser les ordures et balayer la moquette, juste avant l’extinction des feux.
Je grimpe vers ma couchette et y rampe pour trouver une posture acceptant mon sac et mes polaires.
Sommeil relativement calme.