05/02/2014
Réveil par le bruit des pétards… on est encore dans la semaine des fêtes. Et quand les propriétaires des boutiques décident enfin de les rouvrir, il faut d’abord en chasser les éventuels démons. Autant dire qu’il y en a qui mettent le paquet.
Ce matin j’ai voulu aller visiter le 关岭古生物化石群国家地质公园, c’est à dire le « le parc national géologique de fossiles paléontologiques de Guanling ». Pour cela, je dois aller à Xinpu 新铺. C’est à 90 km d’Anshun, mais une autoroute passe à côté. Il fait un temps superbe : 23°, ciel bleu, soleil !
J’ai le mode d’emploi à la gare routière : je vais au coin « information » et demande à une jeune qu’elle m’aide pour mon ticket. Nous resquillons la foule qui fait la queue, toujours aussi brownienne devant les guichets. Mais il y a un problème : on cherche, sur la plateforme des départs qui propose 27 quais (!), le bon bus, mais la jeune fille ne trouve pas le mien… forcément, il n’existe pas. Il faut changer à Guanling. Je monte donc dans le car pour ce bled, la fille reprend mon ticket et revient avec un autre ticket et la monnaie.
À Guanling 关岭 (à noter qu’on est passé pas loin d’un bled qui s’appelle Puding…), changement de car dans une ambiance plutôt folklorique : les cars ne peuvent pas entrer dans la petite gare routière tellement il y a de monde, le passage est encombré par les chariots des vendeurs d’oranges, et l’endroit est si exigu que la moindre manœuvre prend une heure. Et comme un festival se prépare dans la région, il y a, en plein milieu, un attroupement de participants de diverses ethnies en costume de fête !
Le minibus amélioré pour Xinpu fonce sur l’autoroute, mais une fois sorti, on tombe dans un village où il y a un embouteillage incroyable : à un carrefour en Y, il y a, envahissant la chaussée, les étals des vendeurs de babioles, les roulottes avec friteuses et marmites bouillantes, les marchandes de légumes, etc.., un terminus d’autocar, les tuk tuk qui racolent à destination des hameaux avoisinants, ET enfin, la circulation des gens qui ont le malheur de passer par là ! On est resté une heure (vrai !) coincés dans ce carrefour, personne ne voulant reculer… Il y avait même un boucher qui venait de recevoir une carcasse de bœuf, et qui, faute de place dans sa boutique, la dépeçait sur le trottoir, ce qui fait que les piétons encombraient eux aussi la chaussée !
Au détour d’un virage en pleine campagne (on est dans une zone montagneuse), j’aperçois le petit monument qui indique le site géologique, et je demande l’arrêt au chauffeur. Une petite route sur le côté … est-ce la bonne ? J’arrête un gars en scooter ; il ne comprend pas… je lui montre la page sur mon ordi où j’avais noté l’adresse en chinois. Il me dit (probablement…) « c’est loin, je t’emmène », et fait demi-tour et me dit le monter ! L’aubaine : le site est à 2km de ce monument. Il est midi passé.
Il s’agit d’une colline où sont répartis plusieurs bâtiments modernes. Je fais stupeur au guichet où des gens sont en train de bavarder. Je dois être le premier visiteur de la journée. Ticket (50Y). Et une jeune fille me propose de la suivre. Elle se lance dans une grande explication, je l’arrête tout de suite « ting budong » = « je ne comprends pas » ( 听不懂 ). Elle ne parle pas un mot d’anglais. Elle m’amène au premier bâtiment dont elle déverrouille le gros cadenas. En entrant, je reste pantois : est exposé un bout de falaise dégagé laissant apparaître in situ un fossile d’ichtyosaure (vulgairement : un dinosaure marin) de plus de six mètres de long ! Plein d’explications sur les murs … en chinois ! Le seul truc lisible par moi, son prénom : Panjiangsaurus.
Un autre bâtiment, un autre plan de fouilles, avec d’autres fossiles de la même espèce, et aussi ces fameuses crinoïdes (E échinoderme) qui s’entremêlent sur des mètres carrés comme s’ils avaient été placés là, hier…
Un grand bâtiment abrite le musée par lui-même : à l’entrée un mur immense (4×15 m) composé d’un plan de fouille présentant des dizaines de crinoïdes entremêlées ! Quel spectacle ! Voilà pourquoi on appelle ce site la forêt de lys de mer de Guanling ! Puis viennent les salles d’explications, de vidéos, de spécimens. Ça va des origines de la terre, puis à l’origine de la vie, puis aux élémentaires de la géologie, jusqu’à la représentation du milieu marin par un diorama grandeur nature assez efficace.
La fille m’abandonne : d’autres visiteurs (chinois) viennent d’arriver, elle me laisse seul à contempler les dizaines de tableaux composés avec ces fossiles vieux de 220 millions d’années. Ça ne nous rajeunit pas ! Arrive un étudiant, parlant anglais (mais ne comprenant pas le mien…), qui reprend la suite de ma guide – elle l’a appelé d’urgence par mobile, et je ne sais pas d’où il sort, dans cette région semi-désertique.
La visite se poursuit à l’extérieur, sur un point de vue 360° qui doit servir à une description de paysage, mais….
L’endroit est très en relief (on est à 1300m) avec des vallées profondes et des coupes sédimentaires très visibles, la végétation étant encore en sommeil. On est dans le Trias, la même période géologique que pour la caverne de Zhongdong. Les couches sédimentaires sont très bousculées à l’horizon, mais ici, elles sont sagement à l’horizontale.
Sur l’itinéraire, plein de gros cailloux avec des traces d’ammonites. (J’en connais un qui en aurait déjà quarante kilos dans son sac…).
Étonnant tout de même ce musée, à l’écart de tout, riche en collections et ultra moderne mais, presque sans visiteurs.
Vers deux heures, je décroche à regret, car je me dis que le retour va être aussi compliqué que l’aller. Je marche donc jusqu’au carrefour en regardant bien sur les bas-côtés s’il n’y a pas de trace de dragon des mers ! Au carrefour (en plein soleil), j’en ai assez d’attendre : presque pas de circulation, pas de car. J’avance sur la route traversant des hameaux, suscitant la curiosité des autochtones, et tombe sur un chantier d’une maison en construction. Un remblai fait mon affaire : je trouve une petite pierre avec une ammonite ! Bingo ! Les gens me regardent, trouvant bizarre ce type qui fouille dans le remblai…
Quelques voitures arrivent, je fais un signe timide de « stop » et une belle Toyota blanche s’arrête cent mètres plus loin, et on me fait signe de monter ! C’est un couple de la quarantaine avec un garçon et le grand-père, parlant trois mots d’anglais, mais plus grâce au mobile… Et j’ai la bonne surprise qu’ils m’amènent jusqu’à Anshun ! Et j’ai l’honneur d’être placé à côté du conducteur, le grand-père allant se placer à l’arrière pour piquer roupillon.
Arrivé à Anshun à 15h30 (pas d’embouteillage !), je retourne à la gare routière pour prendre un billet pour la route de demain, c’est plus prudent si je ne veux pas rater le car de 10h.
Petite promenade dans Anshun du côté de la colline de la pagode avec un soleil rougeoyant. Toujours cette multitude de gens des ethnies avoisinantes qui psalmodient leurs contes chantés, mais aussi ces gens qui organisent des jeux de hasard clandestins. Alors que règne la bonne ambiance des foules captivées par le spectacle des rues, soudain, branle-bas : les tréteaux des organisateurs de jeux disparaissent, les joueurs s’éparpillent, les curieux rappliquent : la police arrive ! Deux agents, l’air bonhomme et plutôt ennuyés, viennent régler un conflit entre deux gars passablement énervés…