19/03/2011

Réveil à 6h30. Froid glacial, mais surprise ! le ciel est bleu. La brume est partie et le soleil commence à lécher quelques sommets. Le moral remonte parmi les randonneurs qui sortent tous de leur chambre, le nez au ciel pour apprécier. Hier on ricanait au sujet du brouillard et de la grêle, là c’est la joie ! Petit dej dans la salle commune : mon voisin a commandé une pizza. Bon, ce qu’on lui amène est effectivement rond, mais c’est le seul point commun avec les pizzas.

L’érosion à l’œuvre

On part à 7h50 et enfin on peut admirer cette vallée sauvage tant elle est sombre, escarpée, dominée par d’immenses montagnes où la végétation s’accroche tout de même : quelques grands arbres, des bambous, puis des hautes herbes et des gros « choux » verts. Deurali (3200m, 9h15). Le chemin prend à présent le profil du torrent et la montée est plus régulière sur un  sentier où les escaliers deviennent rares. Par contre, ça glisse un max car il a grêlé cette nuit. La vallée s’élargit, probablement parce que là, les anciens glaciers ont fait leur œuvre d’érosion.

On atteint MBC (Machhapuchhare Base Camp, 3700m, 11h40) après avoir traversé quelques névés. On retrouve et on recroise les mêmes petits groupes. Il fait un beau soleil, mais déjà quelques nuages se promènent au-dessus des sommets. On découvre l’Annapurna 1 et en face la « Queue de poisson » Machhapuchhare. On prend la classique egg veg noodle soup avec un big pot of lemon tea, au soleil sur la terrasse dominant l’obscure vallée qu’on vient de remonter et face aux neiges éternelles éclatantes. On n’est pas fatigués et la pause repas est très agréable.

On repart à 12h45 ; la brume s’installe progressivement dans le cirque que forme la chaîne des Annapurna. À partir de MBC, l’itinéraire consiste en une trace dans la neige. Un petit vent froid remonte de la vallée. La pente est assez faible, pourtant on glisse beaucoup car la neige est recuite par la pluie qui est tombée la nuit précédente. La montée dure deux bonnes heures. On est complètement dans le brouillard. Il y a beaucoup moins de passage. Plusieurs groupes se sont arrêtés à MBC pour y passer la nuit.

On est complètement dans le brouillard

Je pense que demain matin, ils vont galérer à patauger dans cette neige à moitié fondue et dans l’obscurité. On arrive à ABC (Annapurna Base Camp, 4130m, 14h30). On prend immédiatement possession d’une chambre (10 m² à quatre lits), on se débarrasse des chaussures trempées et on se met dans du linge sec et chaud. J’ai des soucis dus probablement au froid : diarrhée… On se retrouve avec d’autres randonneurs à la dinning room, les pattes sous la jupe de la table. On admire le trajet qu’on vient d’accomplir par la grande baie vitrée et on regarde ceux qui arrivent comme des fourmis… Assis au chaud, on regarde tomber la grêle qui crépite sur le toit de tôle : on est arrivés juste à temps et on a une pensée pour les « fourmis ». Il y a beaucoup de neige dans la cour de la guesthouse, il fait un froid polaire dans les chambres.

[[ Les guesthouses, le long de l’itinéraire sont pratiquement toutes sur le même modèle : un genre d’Administration du tourisme leur impose quelques normes. Il y a un bâtiment pour les logements, un autre pour le dinning room avec cuisine attenante. Les toilettes et les douches (chaudes, y compris à ABC), sont à l’extérieur. Les logements consistent en des chambres de 6 à 10m² avec de deux ou quatre lits. Peu de place pour remuer une fois les sacs déballés. Les lits ont un drap propre et un oreiller, et, lorsqu’il est l’heure d’aller au lit, on distribue les blanket qui dans la journée sont rangées dans de grands coffres disposés dans la dinning room pour qu’elles ne prennent pas l’humidité. Les sacs à viande en polaire qu’on a achetés à Pokhara ne sont pas inutiles, car ces chambres sont de vraies glacières. La dinning room est chauffée sous la table par un réchaud à gaz. Le repas se fait sur la base d’un menu standard assez varié dont les prix augmentent avec l’altitude. Il faut prévoir (sauf si on emmène sa bouffe avec soi), un budget mini moyen de 1500 Nrp par jour de trek et par personne. ]]

Orage de grêle, vent fort et tonnerre. On entend aussi craquer les séracs des glaciers. Repas et discussion avec les voisins, tout le monde est optimiste pour le temps de demain. La nuit est agitée : grêle et coup de vent, les effets de l’altitude se font sentir : battements de cœur et respiration courte. Ça, plus les crampes aux jambes, le sommeil est léger.