24/02/2010

Meilleure nuit…

On a rendez-vous à 9h pour un Bishnoï safari. Autant dire tout de suite que c’est un attrape-touristes (600 INR/p ) pour voir des trucs bidons censés plaire aux touristes. Le « safari » consiste à faire en 3h30 une boucle de 50km dans la grande banlieue aride et poussiéreuse de Jodhpur ou à peine plus loin, sous le prétexte d’aller visiter les Bishnoï, une secte fondée il y a 600 ans par des intégristes hindous qui font strictement  respecter à leurs adeptes 29 règles (Bish = 20, Noï = 9). On commence par traverser la banlieue SO sur la route de Pali encombrée de camions, entre lesquels zigzaguent les récolteurs/livreurs de lait en motos surchargés de bidons de lait : ils vont ou reviennent des fermes pour livrer à la ville. Premier arrêt : le chauffeur (qui se trouve être le tenancier de l’hôtel) nous raconte une belle histoire héroïque : « il était une fois » (il y a 350 ans) le roi de ce district a besoin d’abattre les arbres (desert tree) dans les villages pour en retirer l’écorce laquelle, une fois broyée, fait un excellent ciment. Les bucherons sont joyeusement à l’œuvre, lorsqu’une femme décide de protéger l’arbre devant sa maison. « Cet arbre fait partie de ma famille. Vous ne pouvez pas tuer un membre de ma famille ! Si vous voulez cet arbre, vous devez d’abord me tuer ». Ce que font les gardes du roi, qui ne s’embarrassent pas pour autant. Clac, la tête coupée de la femme qui couvrait l’arbre de son corps. Aussitôt, c’est la révolte dans le village. Toutes les femmes se jettent sur l’arbre et s’agrippent à lui. Bon, les gardes sont un peu gênés, mais le roi a dit, « font chier, dégager moi ça », alors, y zobtempèrent ! Mais, l’affaire fait du bruit dans les autres villages, et toutes les femmes rappliquent, se collent contre l’arbre et se font décoller la tête. Le chroniqueur de l’époque rapporte 353 victimes. Vous comprendrez aisément que les bucherons eurent du mal à scier l’arbre. Le roi de Jodhpur (le n+1 du roi du district) en veut beaucoup à son fou-furieux de subalterne, d’autant que la révolte gronde dans le royaume (quelques gardes passent à la trappe). Alors, il fait pendre son n-1, et vient s’excuser humblement  auprès des villageois.

C’était notre contribution aux « contes et légendes du Rajasthan ».  Le  site en question n’a rien d’exotique : un enclos où errent quelques vaches (du genre commun en Inde), entre les pattes desquelles picorent des peacocks (paons) trop snobinards pour qu’on puisse les approcher, et quelques écureuils anxieux car ici il n’y a pas de noisettes.

Deuxième arrêt : la poterie. C’est bien connu, le touriste n’a pas son compte s’il n’a pas vu réaliser une poterie sous ses yeux. Après tout c’est bien la première industrie que s’est inventé l’humanité…

Disons tout de même qu’ici, l’originalité réside dans le tour : un cylindre en pierre de  15 cm d’épaisseur et d’un mètre de diamètre posée en équilibre sur un piton fiché dans un creux au centre, et mue à l’aide d’un grand bâton fiché dans un trou au bord de la surface supérieure, comme si on touillait une grande marmite. La pierre étant lourde, l’inertie est importante et une fois l’élan donné, le potier a le temps de monter sa pièce. Autre originalité : dans la glaise, on met de la poudre de bois pour faciliter la cuisson et un peu de ciment pour solidifier les objets.

Quelques zachats …

Troisième  arrêt (après avoir vu quelques antilopes peu farouches – ici les gens ne chassent pas, les hindous ne consommant pas de viande) : la fabrique de tapis (deuxième industrie…). Là, on a bien vu que le village typique « qui n’a pas changé depuis 100 ans » était une pièce rare de bidonnerie, quand, sous les panneaux solaires, le gars qui tisse un duree nous explique en parfait anglais qu’on pouvait acheter son tapis à 7000 INR avec la carte bancaire si on voulait ! On s’enfuit.

Quatrième arrêt : la ferme où on fume de l’opium. 2 temps : un ancien nous montre comment le brave paysan, avant d’aller travailler la journée sur sa terre aride et ingrate, se faisait un thé à l’opium ; puis la femme nous fait faire le tour de sa maison, chichement meublée, le foyer de braise à même le sol de terre  battue. De tout le circuit, c’est la seule maison avec un toit de chaume ! Toutes les autres, dispersées parmi les arbustes piquants et les rares champs assoiffés sont en briques et en ciment…

Sur le parcours on croise d’autres touristes en 4×4, dépités eux aussi…

Dans l’aéroport de Jodhpur, c’est la confusion : pas de panneaux  ni indications annonçant les vols, les gens se bousculant en quête d’un renseignement. Les hauts parleurs, comme dans les Vacances de M Hulot, sont inaudibles. Il y a de l’agitation autour du X ray machine : un type sur un escabeau creuse dans un coffret électrique à l’aide d’un tournevis, et bien sûr, il y a le court-circuit qui plonge l’aéroport dans l’obscurité ! les gens rentrent et sortent dans la 1ère zone de sécurité sans plus de formalités. Au stand de bouffe, qui n’a pas grand chose à envier à ceux du centre ville, on arrive à temps pour acheter les deux derniers sandwiches …  Au deuxième contrôle, plus vigilant, on me pique ma chaîne à attacher la valise dans le train, c’est interdit en cabine. L’avion a du retard (Air India, Jodhpur-Udaipur 3384 INR/.

 Le vol pour Udaipur est très rapide : 35 mn. Une fois arrivés à Udaipur, on attend le taxi de l’hôtel en vain. Au bout d’un quart d’heure, on prend un pré-paid taxi. L’aéroport est assez éloigné de la ville, on met une bonne demi-heure pour arriver à l’hôtel. Le « boss » commence par nous dire que c’est nous qui n’avons pas vus son chauffeur, mais ses arguments ne tiennent pas et il s’aplatit en excuses… La chambre est digne d’un maharadja : joli mobilier, lit à baldaquin.

Il est 17h30, on part pour une visite rapide du centre d’Udaipur. D’abord le  Jagdish temple, juste en face de l’hôtel  (Baba hotel) puis on descend la rue qui mène vers le lac et les petits temples.

On passe sur la presqu’île d’en face et lorsqu’on parvient à  sa pointe, le soleil est déjà couché ; mais il y a encore une jolie lumière et les palais de l’autre côté, ressemblent un peu aux châteaux  des contes de fées. Apéro sur les marches du ghat.

Resto juste à côté (Ambrai . En dépit des palais qui se reflètent dans l’eau calme du lac, de la brise fraîche, des bougies sur les tables, des musiciens discrets, Véronique ne perçoit pas le côté romantique de l’affaire : elle est assaillie successivement par des moustiques assez vicieux pour la piquer à travers son pantalon et une araignée qui lui dégringole dessus depuis l’arbre qui nous protège…  Les mets restent cependant acceptables.