03/02/2014
Debout tôt : j’ai un car à 7h20. Il m’amène sur la route de Ziyun 紫云. J’ai demandé à ce qu’on m’arrête au village de Shuitang 水塘镇, au départ de la route qui mène au parc Getu He 格凸河风景区. C’est une étape importante de ce voyage en Chine: il s’agit d’aller visiter Zhongdong 中洞 ( = la caverne du milieu), la dernière grotte habitée de Chine (du monde ?). Bon, je ne m’attends pas à y voir des hommes préhistoriques, bien sûr ! Mais c’est tout de même intrigant.
Le voyage en autocar au Guizhou n’a rien à voir avec les jours précédents : le car est déglingué, tout le monde braille, on jette les détritus par les fenêtres et on crache par terre. La route traverse des villages de montagne désordonnés, les gens vaquent sur la chaussée et daignent à peine bouger quand le car arrive toutes sirènes hurlantes. Des monceaux d’ordures un peu partout. La Chine profonde…
On passe des cols dont un à 1600 m.
Arrivé vers 10h30 à Shuitang, je confie ma valise à un aimable commerçant au bord de la route. Je m’engage sur la route qui va au parc. Il y a quatre kilomètres avant la bifurcation, puis huit kilomètres après. Une voiture/minibus avec quatre femmes et le conducteur s’arrête : il me dit de monter et qu’après avoir déposé ces dames au parc, il m’amène à Zhongdong. Une petite erreur qui me coûtera à l’arrivée 40Y (et encore, au début, il m’en demandait 100 pour faire 12km).
En fait, j’avais préparé cette visite en faisant des repérages sur Google Earth, que j’ai basculés sur mon GPS. Au départ j’avais prévu de monter à la caverne par un sentier qui part de Darao cun 打饶村 ; cette étape de randonnée fait six kilomètres (de montée). Mais, la piste carrossable, un peu plus à l’est va jusqu’à deux kilomètres de Zhongdong.
Un chemin/escalier part du petit parking à flanc de montagne, parvient rapidement à un petit col. De là, un superbe panorama sur une vallée sans exutoire. On est dans des montagnes calcaires de type karstique, avec grottes, dolines, rivières souterraines, etc. Le relief est ingrat pour les cultures, mais les habitants (de l’ethnie Miao) ont trouvé à négocier des creux de terre entre les rochers calcaires pour y planter quelques légumes et pieds de maïs. Du col, le chemin descend vers le nouveau Zhongdong constitué de petites maisons en parpaing. Puis le chemin remonte pour atteindre la grotte (1200m d’altitude).
Là, le spectacle est étonnant : une caverne dont l’ouverture est d’une centaine de mètres de large, une cinquantaine de haut et sa profondeur est bien de deux cents mètres. La profondeur est occupée par une quinzaine de maisons en paille/bambous tressés, de deux maisons en parpaing (pas de toit), et … d’un terrain de basket ! La moitié des habitations est occupée, le reste est à l’abandon. Il y a des étables, mais les animaux sont sortis. Traînent quelques poules et quelques cochonnets. Les quelques habitants vaquent à des occupations domestiques : cuisine, nettoyage, bain de bébé, lessive, etc…
Il y a dans cette caverne une ambiance sonore très particulière : on se croit toujours au centre du moindre son, du coq qui chante, du bébé qui pleure, d’une télé allumée, de jeunes qui se disputent une partie de cartes, de gens qui s’interpellent dans les maisons.
Je fais le tour de la caverne, encore étonné de ce monde étrange, mais pourtant … normal. Effectivement dans les temps où la vie rurale avait son coût, il était avantageux d’avoir un toit sans avoir à le construire, il était intéressant d’avoir une température tempérée en toute saison, d’avoir des sources à proximité… Puis l’électricité est arrivée, même une école. Mais les tracas aussi : le gouvernement trouvait que ce n’était pas convenable que des gens habitent encore une grotte. Il a fait construire plus bas ces maisons en parpaings et a réussi à convaincre quelques-uns de les habiter. On y a aussi délocalisé l’école. Mais d’autres ont préféré rester. L’ethnie Miao, qui habite les montagnes de la région, n’a pas d’autres croyances que celle qui consiste à vénérer les ancêtres, d’où leur crainte de quitter l’endroit où les générations antérieures sont nées.
Devant les maisons habitées, les gens vous invitent à vous asseoir sur de petits tabourets. Une famille m’a fait entrer dans sa maison au confort frustre car traditionnel : feu à même le sol, lard pendu au-dessus de la tête, lits à l’étage, cloisons de bambou tressé, télé.
Bon, bientôt, ces gens, surtout la nouvelle génération, en auront marre de se taper le chemin de montagne pour la moindre course, ou pour rentrer du travail (s’ils en trouvent dans la vallée). On ne peut pas non plus cultiver encore longtemps le maïs épi par épi !! Cette communauté va probablement dépérir ; et les ancêtres ne seront plus honorés…
Je repars de la caverne après y avoir fait un petit pique-nique. De petits groupes essoufflés arrivent pour visiter. Lors de ma descente, je croise des jeunes qui remontent avec des packs de bière sous le bras : la caverne semble être un lieu de ralliement branché (underground ?!).
Je redescends par le chemin que j’avais prévu pour la montée. Traversée d’un village de montagne aux allures de village savoyard… Là, les gens vivent pareillement que ceux de la grotte : feux à même le sol, lard pendu au plafond !
Je parviens à la route vers 15h. À Darao cun, il subsiste encore quelques maisons traditionnelles : elles sont en bois peint rouille et ont fière allure à côté des maisons en parpaings qui poussent autour comme des champignons.
Alors que je marche à vive allure, je fais un signe à une camionnette bien chargée. Le conducteur s’arrête, me prend jusqu’à Shuitang. Il me fait comprendre que je ne lui dois rien et même qu’il peut m’emmener jusqu’à Ziyun ! Je récupère ma valise au vol….
Pour voir cet itinéraire sur une carte, suivez le lien :
https://fr.wikiloc.com/itineraires-randonnee/la-caverne-de-zhongdong-caverne-du-milieu-6082576
Arrivé à Ziyun, le gars me laisse juste devant la gare routière ! J’ai à peine le temps de comprendre comment elle fonctionne, tant il y a du monde, de la bousculade et du vacarme, qu’un gars et une fille me proposent de prendre le bus qui part à l’instant pour Anshun 安顺 : le gars va jusqu’à aller derrière le comptoir pour demander un billet en express à la guichetière !!

et ils m’amènent à leur car : c’est le chauffeur et son adjointe …
Arrivée à Anshun vers 18h30 à la nuit tombante. J’atterris dans une gare routière toute neuve et gigantesque, construite au milieu d’une forêt de buildings en construction. J’ai un coup de déprime. J’évacue (un peu brutalement peut-être) des rabatteurs qui me demandent où je veux aller, taxi ? hôtel ?
Je prends quelques renseignements aux guichets… Pas facile. Puis je vois sur un parking qu’il y a les bus N° 2,3,4 qui vont au centre-ville, et sur les conseils d’un employé à qui je prête mes lunettes pour lire le plan sur mon guide, je prends le N° 4.
Traversée apocalyptique d’un chantier de 10 km de tours d’habitation en construction. Gigantesques hôtels de luxe. Immense palais du parti. Éclairage des contours de ces immeubles par des lumières LED bleu-violet. Un petit tour devant la gare et je descends un peu au hasard dans un quartier aux allures modestes. Pas de difficulté pour trouver un hôtel à 80Y, petite surface, confort spartiate mais sdb, wifi, eau chaude et … couverture chauffante ! Petite soupe de nouilles et viande, très épicée, dans le restau juste à côté. J’utilise la machine à laver de l’hôtel pour laver mon linge.
Il fait plus froid dans cette région : 17°.