10/02/2014

La vague de froid persiste : -2°. Un grésil tombe et rend chaussées et trottoirs glissants. Des voitures ont les chaînes. Les quatre ponts pour piétons qui encadrent le grand croisement central de Weining sont complètement verglacés. De ma fenêtre d’hôtel, je vois passer un cortège funèbre dans la grande artère centrale…
Pas de grands projets pour aujourd’hui : je prends le train à 17h40 pour Guiyang 贵阳, la capitale du Guizhou 贵州, où je compte passer la nuit. De là, je vais à Kaili 凯里 pour être près du pays des Dong. Donc aujourd’hui, je me contente de rester autour de Weining, du lac et des endroits où il fait un peu chaud…
Pour le lac, je m’aventure dans les entrelacs des jardins potagers en essayant d’aller vers le village que je vois à l’horizon. Mais pas moyen de traverser les marécages. Il y a quelques beaux oiseaux dont des oiseaux blancs et bruns de la taille d’un gros canard, mais qui n’en sont pas. Et je ne vois pas les fameuses aigrettes à col noir, vantées par le LP et les publicités grandioses des projets immobiliers.
Je fais une pause dans une luxueuse agence immobilière (chauffée). De grandes maquettes exposent les projets d’une demi-douzaine de tours qui surplomberont le lac, à la place du seul coin un peu agréable visuellement de la ville. Des maquettes montrent aussi des appartements et leur agencement possible. Je suis accueilli à bras ouverts, mais personne ne parle anglais : une jeune fille me donne des publicités sur papier glacé. Je demande les prix : ils sont affichés sur un grand tableau. En gros il faut compter 2800 Y le m2, soit un peu de 300 €. Le même ordre de prix qu’à Shanghai.
Je me demande qui peut bien acheter de tels appartements. D’autant que des projets comme celui-ci il y en a une vingtaine en cours de construction autour de Weining. Ces jours derniers, j’ai fait le tour de la ville du nord au sud et d’est en ouest, je n’ai vu, à part ce quartier du lac, que maisons délabrées, immeubles vétustes et voiries défoncées. Les habitants du coin n’ont sûrement pas les moyens d’échanger leur masure contre un logement d’un tel luxe. Et je ne vois pas non plus les gens, même riches, de Shanghai ou d’ailleurs, venir ici, car ce n’est pas ce lac qui peut les attirer. En venant à Weining, la route passe par une méga-ville interminable, Liupanshui, elle aussi hérissée de tours, de grues, de centres commerciaux en construction, et quadrillée par des avenues vides 3×3 voies, et ce sur une vingtaine de kilomètres… Mais c’est une ville industrielle et il faut bien loger les gens. Mais ici ?? Sur ce plateau pelé ??
Quelque chose m’échappe dans ces projets : d’où viennent les capitaux ? Qui pour acheter ? Qui pour prendre les décisions de construire ? On parle de bulle immobilière…
Je fais tout de même une concession en m’installant quelques temps au fast-food BDB aux trois quart vide : il y fait chaud et il y a la wifi !
J’ai décroche de l’hôtel de Weining vers 16h30, le train étant à 17h45, pensant que ça me laissera le temps de trouver de quoi grignoter dans le train. C’était sans compter sur les tracasseries policières qu’on inflige ici aux passagers de train. Le bus N°1 arrive devant l’esplanade de la gare (envahie par les chantiers d’un projet immobilier démesuré !…) et je vois une queue immense devant l’entrée de la belle gare moderne : des employés des chemins de fer font régner l’ordre, les resquilleurs étant remis dans la queue avec fermeté.
Cette queue est due à deux contrôles : contrôle d’identité de chaque passager par la police puis contrôle de chaque bagage et fouille des passagers. Et il n’y a que deux postes de contrôle. Il faut dire que les transports en train ne sont pas chers : 50 Y pour Weining – Guiyang (322 km), et c’est le moyen de transport favoris des Chinois. Mais pour acheter un ticket, il faut présenter ses papiers d’identité : les Chinois possèdent une carte d’identité à puce qui est scannée au guichet. Le nom du passager est imprimé sur le ticket. Et lors de l’accès au train, rebelote : cette carte est scannée. Ce qui fait que vous êtes pistés quand vous voyagez en Chine en train. Cela, dit avec les mobiles d’aujourd’hui, c’est pareil ! Pour ce qui me concerne, lors de l’achat, c’est mon N° de passeport qui est enregistré sur le ticket, ce qu’on vérifie lors de l’accès au train.
Le train de Guiyang attend en gare et je n’ai plus le temps de faire mes petits achats… C’est un train à double niveaux, avec une vingtaine de wagons ; il doit pouvoir embarquer plus de deux mille personnes. Dans le wagon (je suis en bas) c’est l’ambiance familiale : les gens mangent, papotent, jouent aux cartes, ceux qui sont seuls trouvent vite des compagnons de jeux. Chaque wagon à un(e) responsable en uniforme qui fait la loi sur un ton qui n’accepte pas de répliques : la moindre lanière de sac à dos qui pend du porte bagage est remise à sa place, ainsi que les paquets qui dépassent… Une personne s’occupe de balayer les détritus que les gens jettent ou crachent par terre, une autre passe de temps en temps avec un trolley et propose des boissons, des victuailles emballées sous vide et des soupes déshydratées (chaque wagon dispose d’une fontaine d’eau bouillante).
Je partage l’espace avec une famille de trois petits enfants turbulents, c’est un peu pénible, mais… Les passagers (beaucoup de jeunes) sont tous des habitants des montagnes de la région qui rentrent à la grande ville après les fêtes.
Le train a un peu de retard : arrivée à Guiyang vers 23h.
C’est un peu la cohue devant la gare et ce n’est pas évident de s’orienter parmi les grandes tours construites autour et qui abritent des hôtels de luxe. Mais dans les petites rues, après quelques essais infructueux (hôtels pleins !), je trouve un hôtel à 148 Y (après marchandage), mais je ne suis pas fier : s’il est propre, le décor laisse à désirer (papiers peints déchirés, rideaux déglingués). Mais il est tard…
Petite bouffe vers minuit dans une des multiples gargotes du coin.
Nuit tranquille.